Syrie, pivot géopolitique de la nouvelle multipolarité mondiale
La Syrie est le pivot géopolitique autour duquel la configuration internationale est devenue irrémédiablement multipolaire. L’échec du changement de régime en Syrie, grâce à la résistance de la Syrie loyale appuyée par ses alliés russe et iranien, a marqué un coup d’arrêt aux changements de régimes selon un effet domino provoqués par les Etats-Unis et leurs proches alliés atlantistes (Royaume-Uni, France) et alliés régionaux (Turquie, Israël et pays du Golfe) pour imposer un monde unipolaire.
La Syrie, à l’intersection des projets géopolitiques rivaux des grandes puissances a été la victime des guerres par procuration que se sont livrées les acteurs mondiaux et régionaux dans la lutte de répartition des espaces géopolitiques, nouvelle phase de la mondialisation. La tentative de déstabilisation de la Syrie par les promoteurs du changement de régime a été menée par un soutien à des révolutionnaires islamistes en provoquant des fractures internes de nature ethno-culturelles et religieuses et par l’envoi de mercenaires islamistes en provenance du monde entier. Après dix années de guerre, la Syrie a pu maintenir son unité grâce à la résistance acharnée de l’armée arabe syrienne et de l’unité nationale sur une base laïque., qu’il fût irresponsable de vouloir remettre en cause.
Le conflit en Syrie s’inscrit dans les guerres du monde multipolaire, qui ont éclaté dans la période de transition entre un mode unicentré et pluricentré.
L’échec du changement de régime en Syrie coïncide donc avec l’émergence d’une nouvelle configuration géopolitique multipolaire. L’évolution de ce conflit marque donc une rupture dans le (dés) ordre international, entre le changement de régime en Libye (2011) dans le sillage des révolutions arabes et le départ des Etats-Unis et l’OTAN d’Afghanistan (2021) qui a marqué la ligne la plus avancée du front euro-atlantiste désormais en recul.
Cette crise marque définitivement la fin du monde unipolaire dominé par un grand Occident, basé sur l’idéologie euro-atlantiste exclusive, portée par les Etats-Unis et ses alliées de l’OTAN (l’Occident tel qu’il était défini depuis la guerre froide).
Le premier bilan que l’on peut tirer de ce conflit en Syrie à différentes échelles géopolitiques est donc le suivant
1) Premièrement, la consolidation du monde multicentré, avec l’échec de la tentative de changement de régime en Syrie par les promoteurs d’un monde unipolaire basé sur l’Europe-atlantisme exclusif et centré sur les Etats-Unis, et le renforcement de l’axe Russie-Iran- Syrie. Sur les temps plus longs, la disparition définitive des équilibres géopolitique issus des accords Sykes-Picot en 1917.
2) Le retour inévitable de la Syrie dans la configuration géopolitique régionale, et la reprise des relations diplomatiques entre pays arabes avec la Syrie
3) La maintien de la Syrie comme Etat avec la reconquête de la majeure partie de son territoire, mais avec encore des zones sous contrôle étranger (Turquie, Etats-Unis, terroristes islamistes et radicaux à Idleb..) et qui gardera pour objectif de libérer ces zones dans une configuration de rivalités entre puissances régionales et mondiales, qui ne favorise pas une stabilisation définitive.
4) La Syrie est un pays dévasté ( bilan humain et économique et de nombreux réfugiés en interne et à l’étranger ) qui nécessite une reconstruction avec l’aide de pays extérieurs , pour éviter toute résurgence de l’EI ou de groupes associé à Al Qaida, ou toute tentative renouvelée d’un changement de régime. La levée des sanctions iniques et contreproductives de l’UE est une urgence.
5) La nécessité de repenser l’architecture de sécurité à l’échelle eurasienne pour structurer le monde multicentré par l’acceptation d’un monde multipolaire basée sur un nouveau concert des Etats plus équilibré, afin de renouer avec un nouveau multilatéralisme,
– pour assécher les conflits, assurer la stabilité,
-engager un dialogue stratégique entre grande puissances pour enrayer les dynamiques religieuses et ethnoculturelles des conflits actuels, en plus de la rivalité des grandes puissances
– Revenir à une nouvelle politique arabe pour la France sur le principe d’équilibre géopolitique, dont la coopération franco-syrienne pourrait être le pivot